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Développement d’un biofilm bactérien au sein des réseaux


Formation du biofilm


La prolifération bactérienne sous forme de biomasse fixée dans les réseaux de distribution d’eau potable est le résultat d’un ensemble de processus physique, chimique et biologique.

Ainsi, la formation d’un biofilm se réalise en plusieurs étapes faisant intervenir ces différents processus :



  • le transport des microorganismes,
  • l’attachement des microorganismes à la surface des conduites du réseau,
  • la colonisation du support.

Transport des microorganismes


Toute adsorption de microorganismes suppose un rapprochement de ceux-ci vers le support. Quatre mécanismes peuvent alors être impliqués :
  • la sédimentation, due aux seules forces de gravité,
  • les bactéries entrent en contact avec la surface des conduites de manière aléatoire (mouvements favorisés par les tournants des canalisations),
  • la turbulence de l’eau à l’intérieur du réseau amène les microorganismes jusqu’au support,
  • la mobilité, pour les microorganismes mobiles, avec ou non des phénomènes de chimiotactisme.

Attachement des microorganismes


L'adsorption des bactéries à la surface des canalisations s'effectue le plus souvent au niveau de dépôts minéraux et organiques, ou à la surface de tubercules de corrosion.

La phase d’attachement des microorganismes peut être divisée en deux étapes principales :
  • l’adhérence, qui correspond à une adsorption réversible des cellules : une fraction des bactéries planctoniques transportées par l’eau, se dépose au niveau de la surface des canalisations. Cette étape ne fait intervenir que des processus physiques (interactions électrostatiques, électrodynamiques), et dépend de la nature du support et de son conditionnement préalable (présence de tubercules de corrosion, par exemple). Les bactéries ne sont fixées que de manière réversible au support ; elles se détachent facilement sous l’action de contraintes hydrodynamiques imposées par le milieu. Cette phase est en général aspécifique et de courte durée (5 à 10 heures) (Gauthier et al., 1989).
  • l’adhésion ou fixation irréversible des bactéries : cette étape est plus lente que la précédente, l’irréversibilité de l’adhésion faisant appel au métabolisme bactérien. En effet, la sécrétion d’exopolymères par les microorganismes leur permet de consolider leur adhésion au support, formant autour de la bactérie, une enveloppe, appelée glycocalix.

Colonisation du support


Dans des conditions favorables, lorsque les bactéries sont fixées de manière irréversible au support, les cellules peuvent se multiplier, selon la quantité de matière organique biodégradable disponible, et le taux d’oxydant résiduel. Il y a alors accroissement de la biomasse et production de métabolites sécrétés par les bactéries. Cette étape de croissance est divisée en trois phases :
  • une phase dynamique de croissance,
  • une phase linéaire de croissance, traduisant une évolution à taux constant et maximale du biofilm,
  • une phase de ralentissement, qui correspond à un début d’équilibre du biofilm entre le taux de multiplication et d’accumulation des microorganismes et le taux de détachement de matière. Ceci met en évidence l’influence des facteurs hydrodynamiques sur le développement du biofilm.
En plus de la multiplication des cellules constitutives du biofilm, la croissance de ce dernier peut également être attribuée à des cellules planctoniques venant se greffer à sa surface.

Les différentes étapes de la formation, puis de l’évolution d’un biofilm, sont présentées sur la figure ci-dessous.

Représentation schématique de la formation et de la structure d’un biofilm au sein d’un réseau de distribution d’eau potabler
Figure 4 : Représentation schématique de la formation et de la structure d’un biofilm au sein d’un réseau de distribution d’eau potable (Center for Biofilm Engineering, Université du Montana).




Organisation des biofilms au sein des systèmes de distribution d’eau potable


Structure des biofilms
La structure des biofilms présents dans les réseaux de distribution d’eau potable est aujourd’hui incertaine. En effet, les conditions d’accès au biofilm, sans détérioration de celuici, sont difficiles, d’autant plus que la biomasse y est présente en faible quantité. Cette difficulté est renforcée par la présence de débris, de produits de corrosion, de dépôts minéraux, de tubercules de corrosion, matériaux susceptibles d’offrir de nouvelles niches ou surfaces à coloniser. Les descripteurs couramment utilisés, tels que l’épaisseur, la densité ou les dimensions fractales, sont obtenus à partir de biofilms générés en laboratoire, et semblent donc plus ou moins inadaptés à la problématique. Cependant, des analogies peuvent être faites (Block et al, 2001):
  • Le biofilm présente une structure hétérogène et discontinue, marquant une dispersion non uniforme des colonies à la surface du matériau. Les agrégats qui se différencient au niveau des biofilms sont entourés par des canaux qui peuvent occuper jusqu’à 50% de volume total du biofilm. Par ces canaux, circulent eau, nutriments, particules et protozoaires.
  • Les biofilms sont constitués d’un mélange de microorganismes d’activité variable en fonction de leur position dans l’agrégat, et des caractéristiques de celui-ci. Ainsi, lorsque les biofilms sont de faible épaisseur (< 40 µm), le transfert de nutriment et d’oxygène n’est pas limité. De plus, les grandeurs traduisant l’activité de l’ensemble (µ, Ks, Y) ne semblent pas modifiées par rapport aux bactéries circulantes. Lorsque le biofilm est plus épais (>80 µm), l’activité respiratoire est plus faible pour les couches les plus profondes.
  • L’accumulation des biofilms à la surface des matériaux se réalise dans des zones où la circulation de l’eau est freinée par des frottements sur la paroi. Les transferts au travers de cette couche de différentes molécules (O2, oxydant, nutriment) sont limités par leur vitesse de diffusion, et une différenciation des métabolismes peut être observée (cf. figure 4).
  • L’état stationnaire des biofilms n’est sans doute jamais atteint dans les réseaux de distribution réels, du fait des discontinuités fréquentes d’alimentation, et donc de la variation du régime hydraulique du système. Ceci peut également être attribué aux changements de la nature et des concentrations en nutriments et désinfectants, l’introduction de nouveaux organismes. Au cours de leur vieillissement, les biofilms de réseau de distribution d’eau potable doivent subir une réorganisation constante, avec la formation de nouveaux microagrégats, de nouveaux canaux, …
Répartition le long d’un réseau de distribution
La dynamique du biofilm s’opère en fonction de la disponibilité en nutriments et de la capacité d’adaptation des bactéries. Ainsi, le long d’un réseau de distribution d’eau potable, le degré de colonisation bactérienne n’est pas uniforme et l’ensemble évolue sous l’action de deux paramètres principaux :
  • le taux d’oxydant résiduel, plus important en tête de réseau et au niveau des postes de rechloration, ne permet pas la non-implantation des biofilms, mais limite leur développement. Cependant, sa consommation le long du réseau de distribution ne permet plus, par la suite, ce contrôle.
  • les éléments nutritifs sont plutôt consommés dans les premières parties du réseau. Aux extrémités, la mort des populations bactériennes s'accompagne d'un relargage des composés cellulaires en raison des conditions défavorables à leur survie. Ce flux de mortalité libère des composés qui servent alors de CODB aux autres organismes.
Ainsi, en tête de réseau, pas ou peu de biomasses fixées sont observables, du fait d’un taux de résiduel d’oxydant élevé (Mémento du gestionnaire de l'alimentation en eau potable, 1994). Le long du réseau, la consommation du chlore résiduel s’accompagne d’une augmentation de la densité des microorganismes. Cependant, la présence de microorganismes entraîne une consommation du CODB de l’eau, ce qui explique une légère diminution de l’abondance bactérienne lorsque les temps de résidence augmentent ou lorsque l’on atteint les fins de réseau.

Régulation physique de la croissance des biofilms


Deux phénomènes de régulation de l’épaisseur du biofilm sont observés :
  • des phénomènes d’érosion, les pertes sont alors localisées à la surface du biofilm,
  • des phénomènes de dépouillement, marqués par des pertes entières de portion de biofilm.
Des facteurs physiques tels que des facteurs hydrodynamiques (régime turbulent sous l’effet des variations rapides de vitesses d’eau, faces de cisaillement…), mais également sous des facteurs biologiques, telles que la lyse cellulaire, ou la formation de bulle de gaz (en condition anaérobie) peuvent entraîner un déséquilibre de la structure du biofilm et un décrochement d’une partie de celui-ci.

Le transport des nutriments et de l’oxygène à l’intérieur du biofilm sont des facteurs importants du décrochage du biofilm. L’existence d’un gradient de diffusion des nutriments est un facteur limitant pour la croissance du biofilm et oriente la composition du biofilm en terme de population bactérienne.